Depuis quelques années, nous voyons fleurir dans les restaurants et les supermarchés des steaks d'un nouveau genre...Avec un marché particulièrement juteux à la clé. Faut-il investir dans cette tendance pour autant ?
Beyond Meat, Le Boucher Végétarien...Difficile de passer à côté de ces nouvelles marques qui se sont immiscées dans les cartes des restaurants du monde entier. Leur promesse : proposer à leurs consommateurs des aliments imitant le plus possible le goût, l'odeur...Bref, l'expérience de la viande. Mais sans viande.
La cible ? Les végétariens d'abord, évidemment. Ce seul segment est en croissance en soi dans de nombreux pays, ce qui pourrait suffire à rendre attractif le marché des steaks à base de végétaux. Mais la cible est en réalité bien plus grande que cela.
Dans les pays occidentaux, la volonté de réduire sa consommation de viande sans pour autant l'arrêter (ce qu'on appelle le flexitarisme) s'accroît également de manière significative. En cause, des arguments écologiques, éthiques, mais aussi sanitaires.
Ces marques viennent répondent précisément à ce marché, allant jusqu'à parfois se positionner côte à côte (sans mauvais jeux de mots) avec les vraies viandes dans les points de vente, plutôt que dans les rayons bio ou végétariens. Ce faisant, elles souhaitent donc cibler le "mass market", plutôt que de se cantonner à un segment de niche.
Et elles ne s'y trompent pas. Car à plus long terme, les steaks sans viande devraient constituer une part remarquable de la consommation mondiale de viande.
Selon Kearney, les viandes vegan devraient ainsi passer de 10% de parts de marché en 2025, à 25% en 2040, pour une croissance annualisée de +9%/an. A contrario, le marché des viandes conventionnelles devrait perdre 3% de sa taille chaque année. Ce double effet est-il une bonne chose pour les Beyond Meat et consorts ? Paradoxalement, pas tant que ça. Voici pourquoi.
Un marché en pleine "commoditisation"
Le problème pour Beyond Meat ou Impossible Burger, c'est justement que si les leaders de la viande conventionnelle veulent continuer à croître, ils ne peuvent se permettre de rester sur un marché qui perd 3% de sa taille chaque année. Ils se lancent donc eux aussi sur le marché des viandes vegan. Et au vu de leur taille et de leurs économies d'échelles, il n'est pas si difficile pour eux de rattraper leur retard sur les acteurs déjà en place.
Résultat, malgré un marché qui n'en est encore qu'à ses balbutiements, on peut déjà voir Beyond Meat se faire sérieusement concurrencer par les acteurs traditionnels, avec des produits tout aussi qualitatifs.
Si Beyond Meat avait anticipé le coup en signant un maximum de partenariats d'exclusivité avec des chaînes de restaurants comme avec des acteurs de la grande distribution, il sera difficile pour le groupe de préserver son rempart concurrentiel encore longtemps.
Un marché disruptif, mais qui en cache un autre
Pour ne rien arranger, le marché ciblé par ces acteurs devrait lui même être concurrencé par un autre, plus prometteur encore bien qu'actuellement inexistant : celui des viandes produites en laboratoire.
Sans rentrer dans les détails techniques, cette technologie permettrait de créer à partir de cellules cultivées in vitro une vraie viande, semblable en tout point à celle achetée chez votre boucher aujourd'hui. Mais sans avoir eu à élever quelque veau, vache, ou cochon que ce soit.
Si le coût de cette méthode était auparavant particulièrement prohibitif, il ne cesse de décroître avec l'avancée de la science et des économies d'échelle. En 9 ans, il est ainsi passé de 300,000$ le steak (ouch), à...9.80$. Au fur et à mesure que son prix diminuera, ce type de steaks devrait ainsi devancer le marché des viandes végan à son tour, et représenter 35% de parts de marché d'ici 2040, pour une croissance annualisée de +41%/an. Particulièrement juteux donc.
Le problème ? Il est encore bien trop tôt pour prédire quels seront les groupes leaders de cette tendance. Tout ce que nous pouvons en dire, c'est que même avec les steaks végan les plus qualitatifs, Beyond Meat et ses concurrents pourraient avoir bien du mal à se démarquer face à ce nouveau type d'acteurs.
Conclusion
Les marchés ne s'y sont pas trompés, et ont infligé au cours de Beyond Meat une giga-correction de plus de 80% depuis l'IPO du groupe en août 2019.
Malgré tous ces vents contraires, le groupe devrait néanmoins conserver une position forte au sein d'un marché en bonne dynamique. La concurrence a beau se presser au portillon, il ne s'agit pas là d'un secteur "winner takes all", a fortiori au vu de sa taille gargantuesque.
Si Beyond Meat ne figure assurément pas parmi nos actions favorites, nous ne serions pas étonnés de la voir offrir des rendements non négligeables à ses actionnaires au cours des 20 prochaines années, en surfant sur une tendance forte et de longue haleine.
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François Sockeel
François est le fondateur de bigfish investing. Après un passage en conseil en stratégie ainsi qu'en banque d'affaires, François se dédie désormais à 100% à sa première passion : aider les particuliers à mieux investir.
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